Les avantages de la diversité et de l’inclusion sur le lieu de travail sont incontestés et, aujourd’hui plus que jamais, les lieux de travail prêtent attention à la race, à l’ethnicité, au sexe, à l’orientation sexuelle, à l’âge, au handicap et à d’autres dimensions lors de l’embauche. Toutefois, malgré l’attention accrue portée à la création de lieux de travail plus équitables, de nombreux employeurs continuent d’exclure les candidat·e·s n’ayant pas suivi d’études post-secondaires. En outre, de nombreux candidat·e·s confrontés à des obstacles à l’enseignement supérieur appartiennent aux mêmes communautés sous-représentées que celles que les employeurs s’efforcent de recruter, de retenir et de promouvoir.
Les recherches nous apprennent que seulement 60 % environ des étudiants qui commencent un programme d’études postsecondaires obtiendront leur diplôme (Grayson & Grayson, 2003). Pourtant, l’enseignement post-secondaire canadien est une exigence courante figurant sur les descriptions de poste, même pour les postes les plus modestes. Les nouveaux arrivants qui ont obtenu un diplôme à l’étranger se heurtent à un obstacle supplémentaire, car il peut être plus difficile d’obtenir la reconnaissance des titres de compétences internationaux. Le préjugé qui favorise les candidat·e·s titulaires d’un diplôme d’études postsecondaires (surtout s’il a été obtenu au Canada) peut empêcher de nombreuses personnes réfléchies, enthousiastes et compétentes d’accéder à des parcours professionnels durables et significatifs.
Dans le même temps, nous constatons des pénuries de main-d’œuvre – en particulier dans le secteur des technologies. Selon le rapport révisé sur les perspectives du marché du travail pour 2022 du Conseil des technologies de l’information et des communications (CTIC), la demande accrue d’emplois dans l’économie numérique canadienne totalisera 102 000 travailleurs entre 2020 et la fin de 2022 (CTIC, 2020). Le CTIC confirme que la demande de talents technologiques a augmenté à l’échelle nationale et avertit que la main-d’œuvre canadienne actuelle dans le domaine des technologies de l’information vieillit rapidement et que la pénurie de compétences devrait s’aggraver.
Comment les organismes de développement de la main-d’œuvre peuvent-ils collaborer avec les employeurs pour s’assurer qu’ils ne passent pas à côté de grands talents, et travailler avec des personnes diverses pour les préparer à être des membres productifs et appréciés de leurs équipes de travail ?
“Le parti pris en faveur des candidat·e·s titulaires d’un diplôme d’études supérieures peut empêcher de nombreuses personnes réfléchies, enthousiastes et qualifiées d’accéder à des parcours professionnels durables et significatifs”.
Pour les agences de développement de la main-d’œuvre, la collaboration avec les employeurs est la clé du succès de nos programmes, mais les employeurs ont une valeur qui va au-delà de la simple fourniture d’emplois. NPower Canada fait participer les employeurs à la conception de programmes qui dotent les demandeurs d’emploi de compétences pertinentes et commercialisables pour des postes subalternes en informatique, très demandés. Les employeurs participent à toutes les étapes de la conception et de la mise en œuvre des programmes, de l’élaboration des programmes d’études et des outils d’évaluation à la co-formation, en passant par le placement et le mentorat après l’embauche.
La participation des employeurs à la conception des programmes et des cursus est essentielle pour relever les défis et les perturbations du marché du travail auxquels nous sommes confrontés. Il est également essentiel de veiller à ce que les personnes qui terminent les programmes d’emploi aient les compétences nécessaires pour obtenir un emploi durable. À chacune des étapes suivantes, les agences de développement de la main-d’œuvre peuvent aider à répondre aux besoins des employeurs tout en défendant les intérêts des demandeurs d’emploi qualifiés qui n’ont pas de diplôme d’études postsecondaires.
- Consultation des employeurs
NPower Canada élabore son programme d’études en consultant fréquemment et régulièrement les employeurs afin de déterminer leurs besoins en matière d’embauche de personnel informatique de niveau débutant et les compétences requises. En comprenant les besoins des employeurs et les tendances futures qu’ils prévoient, nous pouvons concevoir des programmes qui permettent aux participant·e·s d’acquérir les compétences et les qualifications clés nécessaires pour les postes en demande. La participation active des employeurs à la conception des programmes d’études permet également de renforcer la confiance et l’adhésion à la qualité et aux résultats des programmes. Il en résulte que même les candidat·e·s ne possédant pas de diplômes d’études postsecondaires canadiens sont pris en considération et embauchés pour divers postes.
- Développer une programmation spécifique aux compétences
Nous nous efforçons de comprendre les compétences techniques et les attributs professionnels dont les employeurs ont besoin pour les rôles clés. Cela nous permet de développer des micro-certificats : des cours et des certifications accessibles, de courte durée et basés sur des projets. Les micro-certificats permettent aux individus de démontrer leurs compétences dans des domaines clés et d’obtenir des certifications spécifiques à leur secteur d’activité qui peuvent soutenir leur avancement professionnel.
À la suite de consultations avec nos partenaires employeurs, NPower Canada a intégré plusieurs micro-certificats informatiques et numériques dans ses programmes, offrant un accès gratuit et un soutien à l’apprentissage aux participant·e·s. Pour les jeunes qui n’ont pas terminé leurs études postsecondaires ou qui sont confrontés à d’autres obstacles à l’emploi, ces programmes sont essentiels pour obtenir des postes de premier échelon et poursuivre leur carrière.
L’impact de la pandémie de COVID-19 a entraîné un passage immédiat à la diffusion en ligne pour de nombreux programmes de développement de la main-d’œuvre. La croissance et l’accessibilité des microcrédits par le biais de plateformes numériques telles que Coursera, LinkedIn Learning, Microsoft Learn et d’autres offrent aux individus la possibilité de se perfectionner, en dehors des collèges et universités traditionnels.
- Commercialisation des compétences pour les embauches non traditionnelles
NPower Canada défend les intérêts des demandeurs d’emploi sans diplôme d’études postsecondaires par une approche fondée sur les points forts, en faisant la promotion de ses diplômé·e·s auprès des employeurs en mettant l’accent sur les compétences plutôt que sur les titres de compétences. NPower Canada offre aux demandeurs d’emploi un apprentissage appliqué, basé sur des projets et des simulations de travail, afin qu’ils puissent se lancer dans la vie active une fois embauchés. Lorsque les diplômé·e·s s’entretiennent avec les employeurs, ils peuvent parler des compétences qu’ils ont acquises en réalisant ces projets et peuvent expliquer concrètement comment ils appliqueraient leurs connaissances techniques nouvellement acquises à leurs tâches professionnelles. En démontrant qu’ils sont prêts à assumer ces fonctions, à un niveau égal ou supérieur à celui que les employeurs attendent, les candidat·e·s de NPower Canada sont en mesure de rassurer les responsables de l’embauche quant à leurs compétences et qualifications, malgré l’absence d’un diplôme de quatre ans.
- Services de recrutement à cycle complet pour les employeurs
Dès le début du processus d’acquisition de talents, NPower Canada apporte une valeur ajoutée en fournissant aux employeurs une présélection des candidat·e·s, des recommandations, un calendrier d’entretiens et des contrôles de qualité après embauche, le tout sans frais pour l’employeur.
Une fois que les offres sont faites et que les nouvelles embauches sont en place, NPower Canada consulte les superviseurs sur le rendement des candidat·e·s au cours de leurs trois premiers mois d’emploi. Ces points de contact tout au long de la période d’essai nous aident à identifier les points forts et les possibilités de croissance, ce qui permet aux jeunes d’être confiants et de réussir, tout en veillant à ce que les attentes des employeurs soient satisfaites. NPower intègre le retour d’information dans l’amélioration continue du programme
La consultation de nos partenaires employeurs met en lumière le fait que les jeunes talents sont motivés et prêts à travailler dur pour gagner leur place dans l’industrie technologique. Cela encourage les employeurs à envisager un nouveau réservoir (non traditionnel) de candidat·e·s au sein de l’espace technologique.
NPower Canada fournit également un soutien immédiat sur appel pour faire face aux difficultés qui peuvent survenir sur le lieu de travail. Cela permet aux jeunes et aux employeurs de relever les défis et d’établir des relations de confiance avec les employés et les employeurs. En fin de compte, cette approche proactive de soutien à la réussite sur le lieu de travail permet d’obtenir de bons résultats en matière de rendement et de rétention au travail.
Une approche qui a fait ses preuves
En démontrant aux employeurs que les candidat·e·s non traditionnels peuvent obtenir des résultats égaux ou supérieurs à ceux des employés ayant des qualifications plus conventionnelles, NPower Canada a influencé les pratiques d’embauche des employeurs pour qu’ils incluent des candidat·e·s ayant moins d’éducation formelle.
Plusieurs employeurs que NPower Canada avait initialement engagés comme partenaires de recrutement n’avaient traditionnellement engagé que des candidat·e·s titulaires d’un diplôme post-secondaire canadien de quatre ans. Cependant, en recrutant des candidat·e·s de NPower Canada ayant un niveau d’éducation moins formel, souvent pour des coopératives ou des stages rémunérés de courte durée, beaucoup de ces employeurs autrefois sceptiques ont été séduits par l’éthique du travail, l’attitude positive, les compétences et l’envie d’apprendre dont ces jeunes faisaient preuve. Cela a conduit les employeurs à étendre leurs pratiques d’embauche à des candidat·e·s sans diplôme d’études supérieures.
En prouvant aux employeurs que les candidat·e·s non traditionnels représentent une réserve de talents convaincante et formée sur mesure, NPower Canada a également aidé ces employeurs à diversifier leurs lieux de travail, en développant des pratiques d’embauche, des résultats d’acquisition de talents et des environnements de travail plus inclusifs. Sur les 182 diplômé·e·s de NPower Canada embauchés par la CIBC, la TD et la RBC depuis 2015, 105 (58%) s’identifient comme étant de sexe féminin, transgenre et/ou non binaire, 172 (95%) sont racialisés et 77 (42%) sont des immigrants et des réfugiés. Ces résultats d’embauche inclusifs dépassent de loin les normes de l’industrie dans ce qui continue d’être un domaine dominé par les hommes blancs.
Bien que le modèle de NPower Canada se soit avéré être un cadre qui aide les candidat·e·s non traditionnels à obtenir et à conserver un emploi intéressant, il y a aussi des défis à relever. Plus précisément, les observations de l’industrie ont été basées sur les besoins en matière d’emploi d’organisations basées en grande partie à Toronto et plus récemment à Calgary. D’autres régions du pays auront des besoins distincts en matière de talents dans l’industrie et des défis sur le marché du travail, ce qui nécessitera une adaptation continue. En outre, l’instauration d’un climat de confiance et l’approfondissement des relations avec les employeurs nécessitent du temps de la part du personnel, temps qui peut être difficile à découper en raison de la demande croissante de programmes de première ligne.
Alors que nous continuons à travailler pour relever ces défis, les résultats de notre programme nous encouragent à continuer de plaider en faveur de pratiques d’embauche qui incluent les candidat·e·s sans qualifications traditionnelles. Les professionnels du développement de la main-d’œuvre peuvent continuer à soutenir l’évolution de carrière des demandeurs d’emploi en s’engageant profondément auprès des employeurs dans l’élaboration et la mise en œuvre des programmes.
Denisse Alejo est la directrice de NPower Canada pour l’engagement des employeurs, chargée de développer la stratégie de placement de l’organisation depuis sa création jusqu’à son action au cours des cinq dernières années. Son équipe est responsable du placement de plus de 2 000 jeunes de divers horizons dans des postes informatiques et numériques juniors auprès de certains des meilleurs employeurs du Canada. Alejo dirige l’équipe de gestion des comptes et des services aux anciens à travers le Canada, en consultant les employeurs pour comprendre leur stratégie de recrutement et leurs besoins en matière de talents, et pour soutenir leurs objectifs de diversité.
Références
Grayson, J., & Grayson, K. (2003). Recherche sur la rétention et l’attrition. La Fondation canadienne des bourses d’études du millénaire : Montréal, QC. https://www.tru.ca/__shared/assets/Grayson_2003_research_on_retention_and_attrition23683.pdf
ICTC. (2020). La nouvelle normalité guidée par le numérique : Rapport révisé sur les perspectives du marché du travail pour 2022. https://www.ictc-ctic.ca/wp-content/uploads/2020/08/Outlook-ENG-FINAL-8.24.20.pdf